Pathologie moléculaire/canaux membranaires
Les cellules expriment à leur surface un ensemble de protéines transmembranaires spécialisées dans l’échange d’ions ou de molécules avec l’extérieur de la cellule. Les échanges d’ions reposent sur des canaux ioniques dont les anomalies sont à l’origine des canalopathies. Les molécules sont captées par un ensemble de récepteurs de surface qui conditionnent ensuite leur internalisation dans le compartiment intracellulaire vésiculaire.
Canalopathies
[modifier | modifier le wikicode]Les anomalies des canaux membranaires constituent les canalopathies.
Les canalopathies sont un groupe de maladies dues à des anomalies moléculaires des canaux ioniques ou des protéines qui les régulent. Ces maladies peuvent être d’origine génétique (par mutation inactivatrice du gène codant la protéine en cause) ou acquise (par exemple par production auto-immune d’un auto-anticorps ou par action d’un toxique exogène). Les canalopathies sont classées en fonction de l’ion transporté dans le canal et par le siège du déficit fonctionnel constaté (cœur, muscle, nerf).
Par exemple, les canalopathies musculaires comprennent les paralysies périodiques hyper-, hypo- et normokaliémiques, la myotonie congénitale et la paramyotonie congénitale.
Les canalopathies sont l'ensemble des maladies en rapport avec un dysfonctionnement des canaux ioniques membranaires.
Les canaux ioniques sont des protéines qui traversent la membrane cellulaire et qui contrôlent de façon sélective le passage des ions à travers celle-ci. Les canaux ioniques contrôlent l'activité électrique cellulaire et sont donc impliqués dans chaque battement du cœur, dans chaque contraction musculaire et même dans chaque pensée et perception. Leurs fonctionnements entraînent des mouvements de charges électriques à travers la membrane cellulaire et modifient la polarité de celle-ci :
- Dépolarisation par entrée d’ion positif (courant dit entrant)
- Repolarisation ou hyperpolarisation par sortie d’ion positif ou entrée d'ion négatif (courant dit sortant)
Plus de 20 maladies génétiques sont en rapport avec un dysfonctionnement de canaux ioniques se manifestant par des troubles de la rythmicité cardiaque et de la contraction musculaire, mais aussi certaines épilepsies, des maladies neurodégénératives:
- canalopathies neuronales
- canalopathies cardiaques
- canalopathies rénales
Anomalies des canaux sodiques
[modifier | modifier le wikicode]Anomalies des canaux potassiques
[modifier | modifier le wikicode]Anomalies des canaux chlore
[modifier | modifier le wikicode]Anomalies des canaux calciques
[modifier | modifier le wikicode]Anomalies des canaux fixant l'ATP (à boite ABC)
[modifier | modifier le wikicode]Il existe un canal K+ ATP dependant, exprimé dans les cellules bêta des ilots de Langerhans du pancréas , il participe à la régulation de la glycémie et est constitué de 2 types de sous unités (4 sous unités KIR 6.2 canalaires ainsi que 4 sous unités régulatrices SUR-1). Dans une des formes de diabète néonatal, la sous unité régulatrice SUR1 codée par le gène ABCC8 subit une mutation, conduisant à un domaine NBD (domaine de fixation au nucléotide) non fonctionnel. Le K+ ne pourra s'accumuler dans la cellule (car la fixation de l'ATP engendre la fermeture du canal) et ne créera pas la dépolarisation nécessaire à l'activation d'un canal calcique voltage dépendant localisé sur la membrane plasmique. Le calcium n'entrera pas dans la cellule et ne pourra jouer son rôle de second messager de sécrétion régulée: pas de sécrétion d'insuline
Anomalies de transport des neuromédiateurs
[modifier | modifier le wikicode]Anomalies de transport des métaux
[modifier | modifier le wikicode]Les ions métalliques jouent un rôle clé dans des nombreux processus enzymatiques ou pour assurer la structure de complexes protéiques comme l’hémoglobine ou la structure de domaines protéiques comme les domaines de fixation à l’ADN en doigts de zinc de la protéine WT1.
Des pathologies peuvent survenir par carence d’apport alimentaire, par des anomalies des protéines transporteuses ou par excès de pertes.
Anomalies de transport du fer
[modifier | modifier le wikicode]Le fer joue un rôle clé dans la respiration aérobie. Stockée dans le foie, son excès est toxique pour le foie et le cœur. Chez les mammifères, il n’y a pas de voie d’excrétion du fer et l’adéquation entre les besoins et les apports est réglé par la régulation de son absorption intestinale.
Dans le duodénum, le fer intra-luminal est réduit par les ferriréductases de la bordure en brosse entérocytaire, puis capturé par un transporteur protéique DMT1 membranaire. L’efflux de fer le long de la membrane entérocytaire basolatérale est médié par la ferropontine-1 (FP1 ou Ireg1) en conjonction avec la ferroxidase hephaestine. Les ions ferriques se lient à l’apotransferrine et sont transportés dans le plasma jusqu’aux tissus-cibles, en particulier le foie. Dans le foie, ils sont internalisés dans les hépatocytes par une endocytose médiée par le récepteur de la transferrine. TfR2 contribue de façon significative à l’entrée du fer dans les hépatocytes, en particulier en cas de surcharge en fer. L’exportation du fer des endosomes tardifs vers le pool de fer intracellulaire est médié par DMT1. Dans le foie, HFE s’exprime préférentiellement dans les cellules de Küppfer (macrophages des sinus hépatiques), qui relarguent le fer des érythrocytes sénescents.
Le relargage du fer à partir des cellules de Küppfer est augmenté dans l’héméchromatose héréditaire, ce qui suggère un rôle secondaire de HFE dans la régulation de la distribution systémique du fer.
Les fonctions biologiques du fer :
Incorporation dans l’hème : Le fer peut être incorporé dans la molécule hème. Cette dernière s’associera à plusieurs types de protéines pour former les hémoprotéines, en particulier l’hémoglobine érythrocytaire (avec les molécules de globine) et la myoglobine.
Cofacteurs enzymatiques
Dans la mitochondrie, le fer joue un rôle majeur dans les processus d’oxydoréduction. Son homéostasie mitochondriale est assurée par la frataxine, dont l’inactivation génique est à l’origine de l’ataxie de Friedreich.
Six maladies humaines sont dues à des anomalies des protéines régulant le métabolisme du fer
Les hémochromatoses sont un groupe de maladies humaines caractérisées par des dépôts de fer dans les tissus, sous la forme d’hémosidérine, composée d’oxyde de fer. Cette accumulation a un effet toxique pour plusieurs tissus, en particulier le foie (fibrose progressive et cirrhose) et le cœur (insuffisance cardiaque, arythmies), les glandes endocrines (diabète sucré, hypogonadisme hypogonadotrophique, hypothyroïdisme) et les articulations (arthrite destructive).
Les hémochromatoses secondaires sont dues à des apports excessifs en fer, comme dans le cas des transfusions itératives (érythropoïèse inefficace, thalassémies, déficits enzymatiques érythrocytaires comme le déficit en pyruvate kinase).
Les hémochromatoses primitives sont dues à des mutations inactivatrices de gènes codants différentes protéines du métabolisme du fer.
- Les mutations du gène HFE sont à l’origine de l’hémochromatose primitive de l’adulte (HFE1), la maladie génétique la plus fréquente chez les caucasiens (Européens et Nord-américains blancs).
- Les mutations du gène TFR2, codant le récepteur de la transferrine de type 2, et du gène SLC40A1, codant la ferroportine, sont à l’origine de deux autres hémochromatoses primitives de l’adulte (HFE3 et HFE4).
- Les mutations des gènes HJV (codant l’hémojuvéline) et HAMP (codant le peptide antimicrobien hepcidine) sont à l’origine des hémochromatoses juvéniles (HFE2A et HFE2B, respectivement).
Les hémochromatoses néonatales ou infantiles constituent un cadre nosologique différents. Il s’agit de dépôts systémiques d’hémosidérine (foie, cœur, muscle, pancréas) due à des nécroses hépatiques massives fœtales de causes diverses (anomalies vasculaires, facteur procoagulant dans le cadre d’un lupus systémique maternel, infections fœtales systémiques, crise blastique transitoire dans le cadre de trisomie 21).
Anomalies de transport du cuivre
[modifier | modifier le wikicode]Le cuivre d’origine alimentaire est absorbé principalement dans le jéjunum. Dans l’entérocyte, environ 80% du cuivre absorbée est localisée dans le cytosol, principalement fixé aux métallothionéines. Ce sont des molécules inductibles de bas poids moléculaire impliquées dans l’homéostasie, le stockage, le transport et la détoxification des métaux. Elles peuvent lier de nombreux métaux, mais seules les quantités de zinc, le cuivre et le cadmium sont significatives. Après un passage à travers les entérocytes, le cuivre passe dans les vaisseaux de la muqueuse intestinale et gagne la circulation portale, où elle est liée à des protéines porteuses, comme l’albumine, des peptides ou des acides aminés. Il est ensuite transporté dans le foie et dans le rein, dans une moindre mesure, par la circulation systémique.
Le transport dans les hépatocytes du foie comporte plusieurs étapes : la captation du cuivre, la distribution et l’utilisation intracellulaire du cuivre, l’exportation du cuivre. La captation du cuivre est probablement assurée par la protéine transporteuse du cuivre SLC31A1 (hCtr1).
Dans les hépatocytes, le cuivre devrait être fortement cytotoxique. En réalité, il est complexé au glutathion réduit (GSH), peu après son entrée dans la cellule. Rapidement, des protéines cytoplasmiques chaperones du cuivre (comme COX17, HAH1/ATOX1 et CCS) distribuent le métal dans les différents compartiments pour son incorporation dans les différentes protéines associées au cuivre. HAH1/ATOX1 fixe le cuivre et le transfère dans le réseau trans-golgi à la protéine ATP7B. L’ATP7B est un transporteur ATPase nécessaire à l’incorporation du cuivre dans la céruléoplasmine dans le foie et à son excrétion biliaire. L’ATP7B est également impliqué dans le transport du cuivre dans le compartiment vésiculaire, par lequel il peut être livré aux lysosomes.
La protéine transporteuse du cuivre ATP7A comporte 6 sites de transport du cuivre et 6 à 8 domaines transmembranaires. Elle circule entre l’appareil de Golgi et la membrane cytoplasmique où elle intervient pour le transport du cuivre vers l’extérieur de la cellule.
Le cuivre peut être secrété dans le plasma, complexé à la céruléoplasmime, mais il est principalement excrété dans la bile. Son excrétion urinaire est très faible car il est lié à la céruléoplasmine ou confiné dans les érythrocytes et très peu passe la barrière glomérulaire. La sécrétion biliaire du cuivre est encore peu comprise et repose sur deux voies distinctes : une voie vésiculaire impliquant les lysosomes, une autre voie reposant sur le transport par la membrane canaliculaire du complexe glutathion-cuivre, auquel pourrait participer cMOAT le transporteur anionique organique multispécifique canaliculaire.
Les anomalies de transport du cuivre
La maladie de Wilson et la maladie de Menkes sont des maladies graves des transporteurs du cuivre.
La maladie de Wilson est due à des mutations du gène ATP7B. Cette inactivation entraîne une élévation des taux plasmatiques de cuivre et de son transporteur la céruléoplasmine plasmatique. Elle entraîne une accumulation de cuivre systémique, mais touchant en particulier la cornée (anneau cornéen de Kayser-Fleisher), le foie (nécrose hépatique et cirrhose) et le cerveau (encéphalopathie).
La maladie de Menkès (MIM.309400) est une maladie récessive liée à l’X due à une mutation du gène ATP7A, codant une sous-unité d’un transporteur ATPase du cuivre. Elle se caractérise principalement par un retard de croissance intra-utérin, des anomalies neurologiques avec microcéphalie, des anomalies des cheveux et de la peau. La présentation clinique est due à la perturbation de la fonction des enzymes dépendant du cuivre : cytochrome-oxydase (hypothermie), tyrosinase (dépigmentation des cheveux et de la peau), lysyloxydase, monoamine oxydase et ascorbate oxydase. Le déficit en dopamine-bêta-hydroxylase, enzyme également cuivre dépendant, pourrait également jouer un rôle dans les symptômes de la maladie. Il est à noter que ATP7A est également muté dans deux autres maladies génétiques : le syndrome de la corne occipitale (MIM.304150) et le cutis laxa congénital lié à l’X (MIM.304150).