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Tribologie/Nature et comportement des surfaces frottantes

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TRIBOLOGIE

Science et technologie du frottement, de l'usure et de la lubrification.

Les chapitres de cet ouvrage sont suivis régulièrement.
N'hésitez pas à utiliser les pages de discussion pour inscrire vos remarques (positives ou négatives) et poser vos questions.


Plan du livre :
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Quoi de neuf Docteur ?


Le frottement et l'usure mettent en jeu les surfaces de contact ou plus précisément les interfaces, où se produisent des transformations multiples et irréversibles qu'il faut considérer de plusieurs points de vue :

  • état géométrique et micro-géométrique,
  • état de propreté,
  • état physico-chimique, structure des couches superficielles,
  • état « historique ».


« Dieu a inventé les volumes, mais c'est le diable qui a inventé les surfaces », déclara un jour Wolfgang Pauli, confronté à l'extrême complexité du problème ... mais ce n'est pas une raison suffisante pour se décourager !


Aspects géométriques

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Frank P. Bowden et David Tabor ont ainsi présenté les choses : « Les surfaces, même les plus polies, sont grossières à l'échelle atomique et en les plaçant en regard c'est comme si vous retourniez la Suisse et la disposiez au-dessus de l'Autriche ».

Les surfaces usinées ne sont jamais parfaites, elles présentent au contraire des défauts de toutes sortes dus aux procédés d'usinage, aux outils, à la matière, etc. On sait depuis longtemps que ces défauts influent profondément sur la tenue en service des mécanismes et la bonne exécution de leurs fonctions : guidages, étanchéité, ... Quelle que soit la qualité de la fabrication, il existe toujours une échelle suffisamment petite pour que les défauts soient mesurables et la nécessité de les décrire ne date pas d'hier.

Dans « La technique moderne » du 15 juin 1939, l'Ingénieur Général Pierre Nicolau écrivait :

Esclaves de disciplines mathématiques dont toute la savante complexité ne pouvait suffire à rendre compte des imperfections humaines et des caprices de la nature, les ingénieurs ont longtemps méconnu que la valeur pratique des éléments de construction dépend beaucoup plus de leurs caractéristiques locales que des propriétés moyennes de la matière. Ils savent aujourd'hui l'influence prédominante des aberrations et des hétérogénéités de tout ordre, nécessaires ou fortuites, sur la tenue en service de ces éléments ; aussi, depuis quelques années, leur attention s'est-elle tout naturellement portée sur les anomalies superficielles des pièces mécaniques, dont le rôle, évidemment essentiel dans tous les phénomènes de contact (frottement, usure, corrosion, graissage, écoulement des fluides, etc.), s'est par surcroît révélé particulièrement important sous l'effet des sollicitations vives ou périodiques. Une science des états de surface s'est ainsi créée.


Plus la qualité d'une surface est proche de la perfection, plus elle est difficile à obtenir et plus son coût est élevé. Des surfaces inutilement précises causent des pertes économiques qui peuvent être considérables.

« Enough is perfect », dit-on outre-Atlantique !

La description de la finesse d'usinage par un, deux ou trois petits triangles, utilisée pendant des décennies, est depuis longtemps devenue très insuffisante. La vue et le toucher donnent des évaluations subjectives intéressantes mais généralement inadaptées aux nécessités techniques ; de plus, les appréciations sensorielles sont trop subjectives et constituent une source de contestations dans les relations commerciales.


La normalisation précise les termes à utiliser :

  • Surface d'un corps : elle est constituée par l'ensemble des points qui délimitent la portion de l'espace où se trouve la matière de ce corps.
  • Surface géométrique : c'est la surface parfaite, idéale. Sur le dessin, elle est définie géométriquement par le bureau d'études, à l'aide de cotes nominales.
  • Surface spécifiée : elle résulte de la surface géométrique, transformée par le bureau des études qui prescrit les limites de réalisation de cette surface à l'aide de symboles et de valeurs numériques en complément des cotes nominales du dessin.
  • Surface réelle : c'est celle qui est obtenue au cours de la fabrication.
  • Surface mesurée : elle résulte de l'exploration de la surface réelle par des instruments de mesure. Le degré d'approximation de la surface mesurée par rapport à la surface réelle dépend de la technique de mesure appliquée, de la précision de l'instrument de mesure utilisé et de la nature même de la surface réelle.

Les ordres de défauts

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Profils mesurés

On appelle profil l'intersection de la surface réelle avec un plan perpendiculaire à la surface géométrique qui lui correspond.

Un palpeur sphérique explorant une surface vient successivement en contact avec les sommets des aspérités et « saute de crête en crête ». Pour mettre en évidence des défauts de plus en plus petits, il faut diminuer le rayon de ce palpeur, ainsi, l'enveloppe de ses positions successives (ici en trait fort) et la trajectoire du centre du palpeur se rapprochent-elles du profil de la surface réelle.

Il est clair que le tracé du profil exact, c'est-à-dire la détermination de l'écart entre la surface réelle et la surface géométrique nécessiterait un palpeur de rayon nul, ce qui est évidemment impossible. En pratique, le résultat de la comparaison de la surface réelle et de la surface géométrique dépend de l'appareillage utilisé. Encore y aurait-il quelques commentaires à faire sur les déformations des aspérités sous l'effet de la pression du palpeur...

En pratique, on distingue plusieurs ordres de défauts :

Ondulation et rugosité de 3e ordre
  • 1er ordre : écarts de forme et de position : les défauts de planéité, cylindricité, parallélisme, perpendicularité se constatent avec un comparateur dont la touche de rayon R décrit une surface enveloppe appelée parfois surface apparente. On obtient l'écart du premier ordre par référence à la surface géométrique.
  • 2e ordre : ondulation : l'écart des positions de deux palpeurs coaxiaux, dont l'un est le palpeur de rayon R précédemment utilisé pour déterminer le défaut de forme et l'autre une sphère de très petit rayon r, possède généralement une longueur d'onde moyenne ou pas moyen AW, dont l'ordre de grandeur est un petit nombre de mm. L'ondulation est une oscillation de basse fréquence provenant essentiellement des imperfections des machines-outils.
  • 3e et 4e ordre : rugosité : ces micro-ondulations, dues à des vibrations de haute fréquence, accompagnent le passage des outils coupants et l'enlèvement de la matière. Le 3e ordre correspond à des stries ou sillons, défauts périodiques ou pseudopériodiques de pas AR voisin de 0,1 mm, le 4e ordre provient des arrachements qui, eux, sont apériodiques.
Profil total
  • 5e et 6e ordre : ils correspondent respectivement aux structures cristalline et moléculaire.
  • le profil total est la somme des écarts du premier au quatrième ordre.

Ce découpage est parfaitement arbitraire : il y a autant de défauts de forme et donc de rugosités, que de manières de choisir le rayon R qui engendre la surface apparente. Comme l'a fait remarquer l'Ingénieur Général Nicolau : « une surface n'est pas rugueuse en soi, mais par rapport à une surface déterminée qui la touche. C'est ainsi, par exemple, que l'on pourrait imaginer une surface qui apparaîtrait très rugueuse au toucher de l'homme et qui serait parfaitement lisse pour le ciron qui la parcourrait. À monter et descendre les côtes sur un sol qui, à l'échelle de ses pattes, prendrait le caractère d'une patinoire, cet animalcule n'aurait que la sensation d'erreur superficielle de forme ».

Enregistrement des états de surfaces

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Anamorphose

Il faut se méfier des enregistrements qui donnent une image spectaculaire mais exagérée de l'état des surfaces des pièces. En fait la pente moyenne résultant des usinages courants n'est guère que de 20 à 25 %, et les surfaces ressemblent sans doute plus aux monts très émoussés du Morvan qu'aux Aiguilles de Chamonix. Les déplacements des palpeurs, davantage amplifiés perpendiculairement à la surface, provoquent un effet d'anamorphose.

La distribution des hauteurs d'aspérités n'est en général ni isotrope ni gaussienne, sauf pour certains procédés tels que le sablage ou électroérosion.

marteau Cayère - surface bombée

Une très intéressante méthode d'enregistrement des états de surface est due à l'abbé Cayère, qui fut voici quelques décennies un éminent professeur de technologie. Un « marteau » spécial donne des répliques d'états de surface par écrasement d'un métal mou, aluminium recuit ou autre.

Pour une surface plane, on utilise un marteau bombé, inversement, pour une pièce bombée, on utilise un marteau plan. On lâche ce marteau depuis des hauteurs croissantes, jusqu'à ce que le métal remplisse complètement les « vallées » qui séparent les aspérités.

marteau Cayère - surface plane

Cela donne une réplique en creux, dite « empreinte Cayère », qui peut servir pour mesurer les hauteurs d'aspérités, puisque .

Par ailleurs, les bords de l'empreinte reproduisent le profil sous un aspect anamorphosé, avec un grandissement .

marteau Cayère

L'intérêt majeur des empreintes Cayère est de visualiser l'évolution des surfaces, par exemple lors d'un essai d'usure.

Divers appareils restituent l'enregistrement tridimensionnel des états de surface sous forme de graphiques tridimensionnels

Les couches superficielles

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Le frottement est un phénomène à trois dimensions qui concerne une certaine épaisseur de matériau sous la surface. À partir de cette dernière, on doit distinguer plusieurs couches successives qui existent sur l'immense majorité des pièces.

couche adsorbée

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Il ne faut pas confondre adsorption, fixation sur les surfaces de molécules provenant des gaz et des liquides ambiants, et absorption. Ces molécules sont retenues par les forces de Van Der Waals (celles qui permettent la cohésion des solides) ou plus énergiquement encore par des forces de type chimique si les atomes de la surface possèdent des valences non saturées. On parle alors de chimisorption. L'adsorption résulte d'un équilibre entre une évaporation et une condensation.

Dans l'atmosphère, toute pièce est instantanément recouverte d'une couche adsorbée formée surtout d'oxygène, avec d'autres gaz comme la vapeur d'eau, le dioxyde de carbone, etc. Aucun nettoyage mécanique ou chimique ne peut les éliminer totalement des surfaces métalliques, à moins que l'on ne procède sous vide et à chaud (1 000°C ou plus).

La lubrification n'est rien d'autre qu'une « pollution organisée » par adsorption d'hydrocarbures ou mieux par chimisorption d'acides gras ou de produits soufrés, chlorés, phosphorés ... L'énergie de surface élevée des métaux facilite l'adsorption des lubrifiants sauf, on ne sait pourquoi, dans le cas du titane, du zirconium et de l'hafnium.

Les longues molécules d'acides gras, orientées perpendiculairement à la surface « comme des sangsues fichées sur la couche cristalline sous-jacente » (Trillat), sont à peu près inexpugnables.

Les couches adsorbées, épaisses de 0,2 à 8 nm, liées rigidement aux solides, sont plus solides sur les reliefs. Il existe d'ailleurs une rugosité optimale pour leur accrochage. Leur forme est déterminée par les structures cristallines sous-jacentes. On peut dire qu'elles jouent un rôle essentiel dans les processus de frottement. Deux corps frottant dans le vide sans préparation spéciale voient leur coefficient de frottement multiplié par un facteur 2 à 4. Après dégazage sous vide, il peut atteindre 100.


Pratiquement aucune de nos machines ne fonctionnerait, si l'adsorption n'existait pas !

Quand elle existe, c'est sous l'action de la couche adsorbée. Elle a été assez peu étudiée. Constituée surtout d'oxydes et, après frottement, de métaux de la pièce antagoniste, elle peut atteindre 80 nm. D'autres composants, difficiles à identifier, sont des sulfures ou des nitrures souvent plus fusibles que l'oxyde : par exemple NiS 600°C, CuS 220°C, FeS 1200°C, etc. Sur certains métaux comme l'argent, dont la surface ternie est très facile à repolir, la post-couche a une très faible adhérence.

Les couches d'oxydes, dont on connaît mal les processus de formation, se comportent en frottement comme la neige tôlée pour les skieurs. Elles sont renforcées par un substrat dur et affaiblies par des aspérités hautes et aiguës. Leur présence est parfois souhaitable si elles résistent à l'arrachement mais elle est toujours indésirable si elles deviennent pulvérulentes et abrasives. Les anciens artisans horlogers connaissaient intuitivement le rôle des oxydes lorsqu'ils brunissaient les pivots.

L'aluminium, très oxydable, se couvre d'une peau d'alumine étanche aux gaz et résistante. Une bille d'acier frottant sur de l'aluminium commence par glisser sur la couche d'alumine, qui résiste malgré une déformation importante en sous-couche. Si la couche d'oxyde se rompt, alors le grippage survient immédiatement, la trace de frottement voit sa profondeur augmenter et un important bourrelet frontal la précède.

Les aciers alliés au chrome, très utilisés en frottement, voient de même leur surface s'enrichir en oxyde de chrome.

couche amorphe de Beilby

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La structure cristalline du métal est détruite sur une épaisseur de 0,1 à 5 μm, qui dépend du mode d'élaboration de la pièce. On y trouve des atomes ou molécules du matériau et de l'environnement, des oxydes, nitrures ... Pour les alliages, la composition devient hétérogène, complexe et mouvante en fonction de la ségrégation des éléments, laquelle est provoquée ou non par le frottement. Engendrée surtout lors d'opérations comme la rectification ou le polissage, la couche de Beilby répartit les charges et consolide les films d'oxydes mais on préconise parfois de l'ôter par superfinition.

couche écrouie

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Sous la surface des matériaux cristallins, qui sont les plus fréquents (ils comprennent tous les métaux et leurs alliages), on trouve généralement une couche plus ou moins perturbée par la fabrication sur une épaisseur de 0,02 à 0,05 mm et contenant encore des inclusions venant de l'extérieur.

La surface est toujours, et de loin, l'endroit le plus abîmé d'une pièce.

On parle de transformation « liée » quand la surface usinée vient en appui sur un outil et de transformation « libre » dans le cas contraire : électroérosion ou polissage électrolytique, par exemple. La première ne donne ni couche amorphe, ni couche écrouie.

La transformation des surfaces destinées au frottement comporte presque toujours une phase d'ébauche par un outil coupant, suivie d'une finition par abrasion : rectification, polissage, sablage, etc. Un tiers environ de l'énergie de coupe se perd dans les pièces. Le champ de forces au passage de l'outil provoque deux sortes de déformations non élastiques : d'une part les microcristaux glissent les uns par rapport aux autres au niveau des joints de grains, d'autre part des glissements se produisent dans les microcristaux eux-mêmes par cisaillement. L'écrouissage extrême rejoint l'état amorphe. Les couches écrouies gardent à jamais le souvenir de leur usinage.

La capacité de déformation des couches superficielles varie énormément selon leur structure. Dans les grains des métaux, les dislocations se propagent selon les plans de plus forte densité atomique et dans la direction de la plus forte densité linéique. Ces déplacements se produisent en surmontant les obstacles que constituent les défauts des réseaux cristallins. Ils sont facilités par les températures élevées.

Lorsque le glissement plastique surmonte un point de blocage particulièrement stable, il y a émission d'un bruit dont le spectre peut aller des ultrasons aux fréquences audibles (on perçoit facilement un tel bruit en pliant une plaque de zinc, les spécialistes parlent d'ailleurs du « cri du zinc »).

Les matériaux qui possèdent un grand nombre de directions de plans dont les densités atomiques sont voisines s'écrouissent facilement. C'est malheureusement le cas du fer. Au contraire, s'il y a un seul plan de glissement, la lésion est difficile, comme pour le soufre.

L'écrouissage est réduit par lubrification. Il varie beaucoup, et de manière complexe, avec les conditions de coupe : par exemple, la profondeur de passe influe davantage avec les aciers rapides qu'avec les carbures et les céramiques.

couches profondes accessibles aux efforts de frottement

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Le métal sous la couche écrouie est une construction cristalline imparfaite, un arrangement de grains conditionné par l'élaboration, la composition chimique, l'histoire thermique et mécanique de la pièce. Les structures obtenues par moulage, laminage, forgeage, dépôt de matière, ... sont très différentes.

Les zones non défigurées par l'usinage n'en sont pas moins accessibles aux efforts de frottement, aux effets thermiques, à la fatigue, etc. et elles présentent de nombreux défauts :

  • inclusions, particulièrement dangereuses lorsqu'elles sont alignées en files. Elles peuvent favoriser l'usinage (sulfures) mais se révèlent désastreuses pour le frottement. C'est une erreur de croire qu'un métal facile à usiner frottera bien. Dans les métaux ferreux, on trouve essentiellement des sulfures, des oxydes enfermés lors du forgeage et des silicates. Les inclusions peuvent modifier localement le module d'Young et créer un véritable effet d'entaille.
  • trous et porosités, qui engendrent des concentrations de contraintes et stockent diverses matières peu recommandables (grains d'abrasifs ou copeaux, par exemple) qui seront remises ultérieurement en circulation dans le mécanisme.
  • solubilisation d'hydrogène générateur de fragilité, particulièrement dans le fer, le cuivre, l'aluminium, l'étain, l'argent. D'autres gaz dissous dans les métaux liquides forment des bulles lors du refroidissement.
  • dendrites de ségrégation : on rencontre souvent des alignements de certains constituants dans la structure du métal. La distribution des éléments chimiques, homogène à grande échelle, ne l'est plus au niveau des grains élémentaires. La surface peut être enrichie en composés à haut point de fusion (ségrégation positive) ou inversement. Dans les aciers, le phosphore et le soufre ont une forte tendance à créer des ségrégations. Ces défauts favorisent la corrosion et créent des zones de cheminement des fractures.
  • contraintes rémanentes, ou résiduelles, provoquées par le refroidissement brutal, l'usinage ou la juxtaposition d'états allotropiques différents : la transformation d'austénite en martensite, par exemple, s'accompagne de changements de volume. En règle générale les contraintes rémanentes de compression jouent un rôle favorable pour le frottement et c'est l'inverse pour les contraintes de traction. Voici à titre d'exemples, quelques ordres de grandeurs de contraintes résiduelles exprimées en MPa. Les compressions sont comptées négativement.


Contrainte rémanente
Procédé Contrainte en Mpa
Grenaillage - 600
Galetage - 1200
Cémentation + trempe - 900
Nitruration - 800
Trempe superficielle - 900
Dépôt de chrome dur 350
Rectification mal refroidie 1000
  • défauts de traitement thermique. La décarburation diminue de façon catastrophique la limite d'endurance. Les tapures de trempe allant souvent de pair avec la présence d'impuretés offrent un cheminement préférentiel à la corrosion. La surchauffe qui accroît la taille des grains sensibilise le métal à l'effet d'entaille et rend dangereuses les stries d'usinage. La formation d'un excès de cémentite engendre une fragilisation sensible lors des contacts brutaux d'aspérités.
  • etc.

Structure granulaire des surfaces

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L'existence de structures polycristallines sous-entend la présence de discontinuités entre les grains élémentaires formant les pièces et plus particulièrement leur surface.

Les atomes des joints des grains n'appartiennent pas aux plans réticulaires de ces derniers mais à une structure perturbée avec des zones renfermant un excès d'énergie potentielle appelée énergie interfaciale (Crussard), ce qui produit des effets très spécifiques.

Par exemple, les joints sont plus rigides à froid que les cristaux voisins mais à chaud c'est le contraire. En raison des défauts superficiels, les grains de la surface sont moins solides que les autres : ainsi, la résistance maximale du verre qui devrait en théorie atteindre 11000 MPa, dépasse à peine 20 en pratique. En réduisant les défauts, Griffith a réussi à obtenir 630 MPa en laboratoire. Dans ces conditions il est clair que les notions de dureté, de limite d'élasticité, de résistance à la rupture, ... sont sans intérêt sur des ensembles de grains trop restreints pour que l'on puisse appliquer la loi des grands nombres.

Le frottement déplace les grains les uns par rapport aux autres, surtout si les joints contiennent du plomb ou de l'oxyde de plomb. Les glissements dans les grains et la rotation de ces derniers qui use leurs interfaces peut aboutir à des fractures dans les zones de fort cisaillement et à une décohésion, par exemple par frottement sous forte charge. La présence d'oxydes entre les grains est prouvée jusqu'à plusieurs dixièmes de mm de profondeur, surtout dans les frottements secs à grande vitesse.

Les plans de glissement dans les microcristaux, comme les joints des grains, constituent des voies de pénétration pour les éléments apportés lors des traitements de surface, ainsi que l'on peut le constater dans les couches sulfinuzées où l'on distingue parfaitement des lignes de sulfure de fer. Ces dernières favoriseront plus tard des déformations utiles à l'accommodement des surfaces lors du rodage.

Pressions de contact

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Position du problème

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Les surfaces fonctionnelles utilisées en frottement sont presque uniquement des plans, des cylindres et des sphères.

Si les contacts théoriquement ponctuels comme celui d'une bille et d'un plan, ou théoriquement linéiques comme celui d'un cylindre monté dans un autre avec du jeu (palier cylindrique), l'étaient vraiment, ils subiraient en charge des pressions infinies, ce qui est impossible. En fait, les charges sont supportées par des aires de contact très petites, dont l'étendue dépend de la géométrie locale et de l'élasticité des matériaux. À leur niveau, les pièces subissent des contraintes dues à l'effort normal et d'autres, qui se superposent aux premières, dues aux efforts tangentiels.

Lors des contacts surfaciques, plan contre plan par exemple, les zones réelles d'appui sont très restreintes. Il y en a au moins trois non alignées et l'expérience montre que leur comportement est très proche de celui d'un contact bille sur plan.

Théorie de Boussinesq et Hertz

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Sans entrer dans le détail de ce qui demande en soi un chapitre entier, il faut mentionner ici quelques éléments sur la répartition des contraintes dans les zones de contact. Les travaux, classiques, de Boussinesq et Hertz reposent sur plusieurs hypothèses :

  • les corps en contact sont « semi-infinis »,
  • ils sont parfaitement élastiques, homogènes et isotropes,
  • ils sont limitées par des surfaces du second degré (quadriques) au voisinage de la zone de contact,
  • cette dernière est un élément plan très petit chargé perpendiculairement par les forces de contact.

Ainsi, se trouvent négligés des facteurs tels que l'hétérogénéité des matériaux réels, la rugosité des surfaces et surtout les forces tangentielles dues au frottement.

Les principaux résultats mis en évidence par Boussinesq, puis par Hertz, sont les suivants :

  • la surface de contact est une ellipse qui peut prendre toutes les proportions possibles entre un cercle et une bande.
  • la pression de contact sur cette ellipse peut être représentée par un demi-ellipsoïde. Sa valeur maximale, pm, est évidemment atteinte au centre O de l'appui ; elle diminue graduellement jusqu'à s'annuler au bord. Au centre, les deux autres contraintes principales sont des compressions, de sorte que la pression maximale peut dépasser très largement la limite d'élasticité des matériaux (éventuellement près de deux fois) sans pour autant que l'on ait de déformation plastique en ce point. Ce résultat apparemment paradoxal sera justifié plus tard.
  • aux extrémités A et B des axes de l'ellipse, les contraintes radiales sont des tractions et les contraintes circonférencielles des compressions de même valeur absolue. Il en résulte que l'état de contrainte est un cisaillement simple d'ailleurs maximal lorsque l'ellipse devient un cercle et nul lorsqu'elle devient une bande. La traction à la périphérie de l'appui est dangereuse avec des matériaux fragiles.
  • dans les pièces, à l'aplomb du centre de l'ellipse d'appui et en partant de ce point, la contrainte de cisaillement augmente d'abord et devient maximale en un point C situé à une certaine distance de la surface, après quoi elle diminue. Pour un contact circulaire de rayon a, la profondeur du point C est telle que OC = 0,47 a. Dans la plupart des applications de frottement la contrainte de cisaillement en profondeur τm est la plus dangereuse et vaut environ 0,3 pm.

On parle de contact hertzien, de pression de Hertz, etc.

Lorsque l'on fait intervenir le frottement, le problème devient très compliqué et, d'ailleurs, contraire aux hypothèses de Hertz. Les modifications essentielles qui en résultent sont développées dans le chapitre spécial et se résument pour l'essentiel aux points suivants :

  • à l'arrière d'un frotteur glissant ou tendant à glisser, des contraintes de traction sont créées ou augmentées.
  • vers l'avant du frotteur règnent des compressions supérieures à la pression maximale de Hertz. Les contraintes de traction y sont diminuées ou remplacées par des compressions.
  • le point de cisaillement maximal remonte vers la surface, du côté de l'avant du frotteur.

Naturellement, chacune de ces sortes de contraintes donne des formes de dégradation particulières : déchirures de surtension à l'arrière ou autour des frotteurs, écoulements et fluages à l'avant, fatigue ou effondrement des couches profondes sous l'effet du cisaillement maximal appliqué de manière cyclique ou non. Tout ceci est analysé dans le chapitre consacré à l'usure.

Les idées de Bowden sur le frottement

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Pour l'essentiel, les idées claires dont nous disposons sur ce sujet sont dues à Bowden.

Début du frottement

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Les surfaces réelles n'ont pas grand-chose à voir avec les traits du dessinateur. Les charges sont appliquées en un très petit nombre de points où agissent des pressions considérables. Des contraintes mécaniques localement énormes entraînent des déformations élastiques et plastiques répartissant les charges.

Dans les premiers instants du fonctionnement ces efforts exagérés entraînent une augmentation des aires d'appui, il y a une période d'adaptation des surfaces appelée accommodement. Il est important au cours de cette phase que les déformations soient maîtrisées et même provoquées de manière judicieuse.

Coup de râpe initial

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L'expression est due à Marcelin : les rares aspérités sur lesquelles portent les pièces s'accrochent, sont arasées par les premiers mouvements relatifs, décapitées, déchiquetées, déformées plastiquement jusqu'à répartition correcte de la charge. C'est la période la plus difficile du rodage, qui est la première usure d'un mécanisme, par les chocs des aspérités, l'émission de débris abondants et l'échauffement. Les aspérités moins hautes que les autres sont moins sollicitées, ne dépassent pas la limite d'élasticité et reprennent leur forme. Des zones de variétés allotropiques différentes, qui n'ont pas la même limite d'élasticité, sont diversement déformées.

Les surfaces ne deviennent conformes aux hypothèses de Hertz qu'après le coup de râpe initial, d'après Marcelin.

Premières transformations

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Le point de fusion de l'un au moins des métaux est atteint de manière localisée et fugitive, ce qui provoque tout un ensemble de phénomènes physiques et chimiques : fusion, diffusion, trempe, formation de solutions solides et de composés ioniques, oxydations, transformations allotropiques, soudures, arrachements, concassage des cristaux superficiels ...

L'échauffement microlocalisé aux aspérités en contact à un instant donné est prouvé par effet thermoélectrique. L'expression température-éclair décrit bien les successions d'échauffement et de refroidissements à des taux de 107°C/s.

Ce phénomène est à la base du polissage, égalisation des surfaces par fusion ou ramollissement des crêtes qui comblent le fond des sillons. Le polissage est d'autant plus facile que l'on utilise des produits moins fusibles, et non plus durs. Le camphre, produit extrêmement mou qui fond à 178°C, polit des métaux relativement durs comme les alliages de Wood fusibles entre 35 et 120°C mais pas l'étain, plus mou, qui ne fond qu'à 232°C. La condition nécessaire (mais pas suffisante) pour qu'un corps A puisse polir un corps B n'est pas, comme on le croit généralement, que A soit plus dur que B, mais bien que A soit moins fusible que B.

Les échauffements microlocalisés peuvent transformer les structures. Par exemple, la martensite peut donner de l'austénite lors du meulage d'un acier rapide et inversement, un frottement sévère peut entraîner la transformation d'austénite résiduelle en martensite sur de l'acier inoxydable au molybdène 18.12 Mo.

Déformations des couches superficielles

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Le contact réel, ne pouvant pas être ponctuel, entraîne des déformations hertziennes des zones profondes, d'où deux genres d'accidents plastiques : arasement en surface des pics ou arêtes et fatigue et écrouissage des couches profondes sous l'effet des glissements à l'intérieur des grains et de la rotation de ces derniers. Ces phénomènes sont favorisés lorsque des possibilités de transformation structurale existent, par exemple austénite-martensite, qui s'accompagne de changements de volume.

Il y a par ailleurs labourage des surfaces, formation de rainures et de bourrelets frontaux par déformation plastique du composant le plus mou des deux surfaces en mouvement relatif. Une portée sphérique appuyée, puis soumise à un effort tangentiel, donne naissance à un bourrelet qui se propage en précédent le curseur (Kragelsky et Courtel). La formation du bourrelet par déformation plastique prépare l'usure et peut éventuellement expliquer la naissance du grippage épidermique.

Le bourrelet frontal est une surélévation de matériau refoulé devant le frotteur sous l'effet des contraintes tangentielles. Chaque aspérité du frotteur doit repousser, labourer ou franchir en la sautant la butte qui s'oppose au mouvement.

Les déformations superficielles ou profondes absorbent de l'énergie par hystérésis ou plasticité, elles expliquent en partie la résistance au mouvement lors des mouvements de glissement ou de roulement.

Transformations dans l'interface

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L'interface de frottement est une zone très perturbée par les efforts et les interactions des matériaux des pièces. Est-ce une solution de continuité entre les deux matériaux, une zone d'équilibre instable clivant un arrangement atomique ? Se demande Jean-Jacques Caubet ?

Les dégâts produits par le frottement proviennent en grande partie de la soudure des aspérités des pièces frottantes. Cette soudure est facilitée, comme cela a été écrit, par l'existence simultanée de hautes pressions et de hautes températures dans les zones de contact. Il faut donc étudier la miscibilité des matériaux constituant le couple de frottement. Coffin a lancé les bases de ce travail en 1952 et défini trois catégories :

  • métaux totalement insolubles ne formant aucun composé intermétallique d'aucune sorte,
  • métaux totalement insolubles mais formant à haute température des composés intermétalliques,
  • métaux solubles partiellement (par exemple le cuivre et l'argent) ou totalement (le cuivre et le nickel).

Ceci est généralisable à d'autres matériaux que les métaux. Les jonctions formées sont principalement de deux sortes :

  • les composés électroniques, qui ont été particulièrement étudiés en 1931 par Hume-Rothery et ultérieurement par d'autres chercheurs, sont proches des composés chimiques mais non déterminés rigoureusement par le jeu des valences. Un alliage électronique est probable si les atomes de l'un et l'autre corps s'attirent plus que ceux d'un même corps et si aucun n'a de caractère électronégatif trop évident : on en connaît de très nombreux exemples avec des structures cubique centrée (CuZn, Cu2Al, Cu3Sn, FeAl), cubique complexe (Cu5Sn, Cu55Zn8, Fe55Zn21), hexagonale compacte (CuZn2, Cu3Sn ).
  • les solutions solides se forment lorsque les atomes de deux matériaux s'attirent avec la même intensité que ceux d'un même matériau. On distingue des solutions solides interstitielles où des atomes de petite taille sont insérés entre les atomes beaucoup plus gros d'un réseau cristallin et des solutions solides de substitution, ordonnées ou non, dans lesquelles les atomes du réseau sont remplacés par d'autres de taille voisine.

Avec certains matériaux il peut exister différentes configurations successives en fonction des concentrations relatives : par exemple, lorsque le fer contient de 0 à 18 % d'aluminium cela donne une solution solide désordonnée. Jusqu'à la combinaison correspondant à Fe3Al les atomes se placent dans des positions particulières et l'on a une solution solide ordonnée. À partir de cette concentration et jusqu'à FeAl un second type de solution ordonnée apparaît. Il y a donc une sorte de chaîne continue de solutions solides successives.

métaux compatibles et modes de frottement

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Seuls peuvent frotter avec des surfaces nues et propres des matériaux totalement insolubles l'un dans l'autre. Dans le cas contraire, il se produit des filiations cristallines par échauffement et pression, aboutissant à des soudures. Un métal frottant sur lui-même est évidemment la situation à rechercher pour le soudage (autrefois, les forgerons de village soudaient les éléments d'acier en les martelant à chaud, aujourd'hui on raboute par choc brutal des câbles conducteurs en aluminium venant juste d'être limés pour éviter la présence d'alumine). Il va de soi qu'une telle situation doit autant que possible être évitée en frottement.

Si la résistance au cisaillement des soudures est supérieure à celle du corps le plus tendre, celui-ci est cisaillé et transféré sur l'autre, puis, très vite, frotte sur lui-même, d'où le terme de frottement par soudure. Le coefficient de frottement f est alors le rapport entre la résistance au cisaillement t et la limite d'élasticité R de ce corps : P étant la charge normale, T l'effort tangentiel moteur, S la surface théorique du contact et s sa surface réelle, on a :

P = sR et T = st
Il en résulte que T/P = st/sR = t/R

Si les soudures de l'interface sont plus fragiles que le plus fragile des corps en présence il n'y a ni transport de métal ni lésion des surfaces, c'est le frottement par cisaillement, qui est inférieur au précédent. Les micro-soudures sont rompues à l'interface sans émettre beaucoup de débris, contrairement à ce qui se passe dans le frottement par soudure.

On trouvera une liste des couples de matériaux donnant de bonnes caractéristiques frottantes dans le chapitre sur l'usure. Ces couples ont pour caractéristiques :

  • de ne pas donner de filiations cristallines continues et homogènes, par exemple le chrome et l'argent.
  • ou de ne donner, dans le cas contraire, que des composés intermétalliques fragiles comme dans le cas du fer et de l'étain où ces composés diminuent la probabilité du grippage. La formation de composés fragiles peut être favorisée par la présence d'un troisième corps : par exemple, l'aluminium et le fer qui constituent en temps ordinaire un couple de frottement très mauvais, deviennent des matériaux acceptables en présence de soufre, élément essentiel pour les traitements de surface par diffusion. L'acier sulfinuzé frotte convenablement sur l'aluminium car les alliages aluminium-fer sont fragilisés par le soufre.

La théorie du cisaillement des jonctions explique en partie le faible coefficient de frottement de matériaux durs sur des couches minces de matériaux mous : dépôts de plomb, indium, sélénium, PTFE, MoS2. Elle explique aussi que le frottement sec, même sous faible charge, produise toujours des dégâts notables. Par contre elle se révèle insuffisante dans bien des cas, d'où la nécessité de considérer d'autres paramètres. On ne sait pas pourquoi, par exemple, un frotteur d'argent frotte bien sur une piste en fer, tandis que le frottement d'un curseur de fer sur une piste d'argent est mauvais, et pourquoi l'on trouve alors deux coefficients de frottement différents. Il existe aussi des couples de métaux qui présentent une vitesse critique telle qu'en-deçà, le frottement se fait par soudure et au-delà, par cisaillement ...

rôle des couches d'oxydes

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Les films d'oxydes sont moins susceptibles de donner des filiations cristallines que les métaux, en raison de leur structure amorphe. Toutefois, il faut prendre en compte d'autres paramètres, leur dureté et leur point de fusion.

A faible charge et vitesse lente, les oxydes ne risquent rien et le choix des métaux est secondaire. À plus forte vitesse, il faut que ce soit un oxyde qui fonde en premier et non un métal. À des vitesses encore plus grandes la rupture des films d'oxydes est inévitable et le choix des métaux est prépondérant.

migrations dans l'interface

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L'exemple de quelques métaux cuivreux frottant sur l'acier donne à réfléchir à un autre aspect du problème :

En faisant frotter du cuivre non allié en atmosphère neutre d'azote, on provoque l'apparition d'amorces de grippage par transfert du cuivre sur l'acier, l'émission de débris, et l'on note une élévation brusque du coefficient de frottement. Avec le bronze UE12P en atmosphère neutre d'azote, on constate l'apparition progressive d'un composé rouge sans modification du frottement. Il y a enrichissement superficiel du bronze en étain et en fer, appauvrissement en cuivre.

Dans l'air ambiant le cuivre se recouvre progressivement d'un composé noirâtre formé d'oxydes de cuivre jouant un rôle protecteur contre le frottement. Le bronze UE12P donne d'abord un coefficient de frottement constant voisin de 0,08, puis qui s'abaisse jusque vers 0,04 tandis que se forme une couche brunâtre riche en oxygène, en carbone et en fer, ces derniers provenant de l'acier antagoniste.

Dans les deux cas de figure il existe une rugosité au-delà de laquelle les pièces grippent instantanément, la couche protectrice étant râpée.

Tout ceci pose de multiples questions et les choses se compliquent encore quand on lubrifie. Heureusement, on dispose aujourd'hui de méthodes d'investigation permettant de connaître la nature et la structure des éléments présents, leur disposition, leur forme chimique : diffraction des rayons X, méthodes nucléaires, spectrométrie des photons, des électrons, des ions secondaires. La plupart de ces méthodes nécessitent le vide.

Il faut par ailleurs connaître les surfaces sur des profondeurs de plusieurs dizaines de microns. On peut actuellement non seulement déterminer la composition des films interfaciaux adhérents mais aussi émettre des hypothèses sur la chronologie de formation de ces films.

C'est ainsi que l'on trouve des choses étonnantes : dans le frottement de certaines matières plastiques sur les métaux, on s'aperçoit que des atomes métalliques se dissolvent dans la surface antagoniste.

L'ensemble de ces observations montre que le bon fonctionnement d'une pièce en alliage est assujetti à la formation à sa surface, en cours de frottement, d'une couche protectrice de composition très différente de celle du métal à cœur, mêlée d'oxydes et de débris de l'antagoniste, couche dont la bonne tenue dépend essentiellement de la nature de l'ambiance et de la rugosité de la pièce antagoniste.

Le frottement se révèle donc être, dans la plupart des cas, un phénomène à trois corps : les deux pièces et le film de transfert créé entre elles.

phénomènes thermiques

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Les résistances passives produisent de la chaleur qui se répartit inégalement entre les deux corps, de sorte que le choix du matériau de la pièce la mieux ventilée est extrêmement important.

Les divers phénomènes thermiques accompagnant le frottement ont été étudiés par Marcel Brillouin au siècle dernier. Il est très difficile de vérifier si effectivement les deux surfaces frottantes sont à la même température. La quantité de chaleur produite par le frottement ne naît pas forcément à l'interface, mais éventuellement aussi dans les pièces. Tout ceci ne facilite pas les choses. On connaît toutefois la loi de Charron : lorsque deux corps de géométrie et de cinématique identiques frottent l'un contre l'autre, la chaleur produite se partage entre eux proportionnellement à leur facteur , où L est la conductivité thermique, c la chaleur massique et d la densité.

Dans les cas où une forte dissipation de chaleur est prévue, aucune bonne solution n'a encore été trouvée en utilisant le frottement sec.

Genèse des coefficients de frottement

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Les forces de frottement correspondent à des pertes d'énergie appartenant à deux catégories :

  • d'une part, celles qui correspondent à la rupture des ponts créés par l'adhérence, donc au cisaillement épidermique.
  • d'autre part, celles qui correspondent aux diverses déformations : labourage et constitution du bourrelet frontal, déformation plastique des petites aspérités, glissements dans et entre les grains du matériau et d'une manière générale, récupération imparfaite des déformations élastiques par suite de l'hystérésis.

Les coefficients changent profondément selon que l'on glisse, pivote ou roule, selon la part des cisaillements épidermiques ou des déformations. En règle générale les cisaillements sont prépondérants dans les mouvements de glissement et de pivotement, pour le roulement ce sont les pertes par hystérésis qui prennent le dessus. Lorsqu'il y a combinaison de mouvements de plusieurs sortes, par exemple glissement et roulement, il devient hasardeux de faire des pronostics.

En général le coefficient d'adhérence est généralement plus important que le coefficient de frottement. On interprète ce phénomène par la montée des aspérités d'une pièce sur celles de l'autre pour que le déplacement puisse avoir lieu. Une fois cette montée accomplie, on pourrait penser que les surfaces n'ont pas le temps de retomber lorsque la vitesse est assez forte, mais ceci n'est pas du tout évident.

Si l'on applique une charge tangentielle à une bille pressée en contact avec un plan, on constate que la partie avant de l'empreinte est plus large que la partie arrière. La bille se déplace un peu dans le matériau avant que le glissement ne commence vraiment. L'état d'équilibre d'avant l'application de la charge tangentielle est rompu. La bille, qui modélise ici le contact d'aspérités, se décale latéralement en même temps qu'elle s'enfonce. Verkhovskii en 1927, puis Courtney-Pratt ont étudié en détail les déplacements préliminaires.

Le frottement est par ailleurs lié à divers phénomènes vibratoires, dont le plus connu est le mouvement baptisé en anglais « stick-slip », ce qui signifie littéralement colle-glisse. Il s'agit d'un processus de relaxation dont on peut trouver de nombreux exemples : frottement de l'archet contre la corde d'un violon, freins qui grincent, craie qui crisse sur le tableau, ... On constate des à-coups dans les vitesses lentes : D'après Courtel, chaque temps d'arrêt permettrait à une rangée d'aspérités de se réenclencher dans l'autre, d'où un coefficient de frottement oscillant et des vibrations normales et tangentielles qui sont simultanées, de même fréquence et en phase. Ce mode de frottement laisse des traces d'allure périodique.

Par ailleurs, il faut signaler que le coefficient de frottement peut devenir très faible dans le cas où les pièces frottantes sont excitées par une source de vibrations extérieure.


Paramètres pour la fabrication

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Les surfaces frottantes doivent être conformes à des critères précis et il est bien évident que le bureau d'études doit se préoccuper des protocoles de fabrication des pièces qu'il aura dessinées. Il existe heureusement un certain nombre de règles de l'art qui seront étudiées plus loin.

L'état de surface doit être parfaitement spécifié. Par exemple, l'étanchéité dans un tiroir hydraulique dépend davantage de la disposition, de la profondeur et de la forme des sillons que de l'espace ménagé entre les pièces. L'élaboration des relations entre les critères géométriques et l'état de surface est hélas rendue très difficile en raison du nombre de paramètres.

Les calculs de résistance des matériaux n'ont de valeur qu'en fonction d'une structure donnée et ils doivent concerner des volumes de matière tels que les lois statistiques puissent s'appliquer. Ce n'est évidemment pas le cas pour les surfaces.

Il faut combiner les contraintes de frottement qui peuvent être, de loin, les plus dangereuses, avec celles résultant d'autres sollicitations. L'endommagement des surfaces par frottement joue le rôle du premier stade de la fatigue et raccourcit considérablement la durée de vie des pièces jusqu'à l'amorçage de la fissuration, laquelle est favorisée par les sillons laissés par l'usinage ou l'usure.

Les contraintes résiduelles de compression retardent la fissuration sans modifier la durée entre l'apparition d'une fissure et la rupture. Or, le simple changement de fluide d'arrosage en rectification peut inverser le signe de ces contraintes résiduelles.

Autrement dit, lorsque l'on aura trouvé la bonne méthode de fabrication, il faudra s'efforcer de la codifier et surtout il ne faudra la changer, même légèrement, qu'après des essais et une nouvelle codification. Les exemples ne manquent pas, de causes apparemment négligeables ayant entraîné des catastrophes :

  • changement de fournisseur de fonte, pour des pistons de compresseurs frigorifiques,
  • teneur en phosphore du bronze utilisé pour des paliers de poupées de tour.
  • remplacement d'un outil en carbure par un autre en acier rapide dans l'usinage de cylindres de compresseurs.
  • ...