Sécurité des systèmes informatiques/Sécurité informatique/Détection d'intrusion
Par rapport aux moyens présentés précédemment qui sont avant tout des moyens de protection ou prévention des intrusions, les techniques de détection d'intrusion sont orientées vers la surveillance du système informatique et constituent dans une certaine mesure des moyens de tolérance aux intrusions.
L'objectif de la détection d'intrusion est de repérer les actions d'un attaquant tentant de ou tirant parti des vulnérabilités du système informatique pour nuire aux objectifs de sécurité du système, ou utilisant des techniques recensées comme des techniques d'attaque. La relation entre une intrusion et les objectifs de sécurité du système n'est pas toujours mentionnée, mais nous considérons qu'il est indispensable de se référer à la politique de sécurité du système informatique pour définir précisément ce qui est une intrusion pour un système donné, c'est à dire une défaillance de sécurité.
Il est vrai que, dans l'état de l'art au sens le plus large, il est possible de recenser un certain nombre d'actes ou d'actions techniques qui sont considérées par une large majorité comme des attaques répréhensibles. Dans ce cas, un système détectant l'occurrence de ces attaques peut suffire à identifier des intrusions sans établir de relation directe avec les objectifs de sécurité. Toutefois, dans nombre de situations concrètes, c'est plutôt la situation inverse qui est rencontrée : ce sont des actions suspectes mais dont la malveillance n'est pas avérée qui sont identifiées. C'est alors bien souvent la mise en relation avec les objectifs de sécurité du système qui permet de décider de l'intérêt de suivre ou non ces actions détectées et leurs conséquences. Par ailleurs il nous semble que la politique de sécurité de tout système d'information se doit aussi d'interdire ou tout au moins d'encadrer dans un cadre obligatoire précis l'exécution d'attaques (au sens commun) sur le système informatique.
Terminologie
[modifier | modifier le wikicode]La caractérisation des différents systèmes de détection d'intrusion existants explorés dans le domaine de la recherche a conduit à la classification terminologique présentée dans la figure suivante. Cette terminologie permet de différencier les systèmes de détection d'intrusion (ou IDS pour Intrusion Detection System) suivant un certain nombre de caractéristiques.
On peut d'abord faire une distinction assez fondamentale sur la méthode de détection utilisée par l'IDS. Il existe deux grandes catégories de méthodes de détection explorées dans la littérature : celles basées sur une approche comportementale (par exemple l'analyse statistique, l'analyse bayésienne, les réseaux neuronaux) et celles basées sur une approche par scénarios (par exemple la recherche de signatures, le pattern matching, ou la simulation de réseaux de Petri par exemple).
Globalement, les approches comportementales visent à reconnaître un comportement anormal, que ce soit par rapport à une définition du comportement normal ou anormal fournie au système de détection d'intrusion (par exemple une spécification de protocole de communication) ou par rapport à une modélisation des comportements normaux ou anormaux apprise à partir d'une observation préalable du système (en salle blanche, ou tout simplement en réel). Dans le cadre d'une approche comportementale, l'apprentissage semble donc possible, tout comme la possibilité de détecter des attaques inconnues au moment de la conception de l'IDS, à condition qu'elles génèrent des anomalies perceptibles dans le fonctionnement normal.
Par contre, dans une approche par scénarios, l'IDS s'appuie sur une base de connaissance pré-existante décrivant les comportements normaux ou anormaux et utilise cette connaissance pour la reconnaissance des évènements produits par des actions d'intrusions dans le système informatique qu'il observe. Cette méthode implique donc la constitution et la mise à jour régulière d'une base de connaissance référençant les différentes attaques connues susceptibles d'être mises en œuvre dans un système informatique. C'est à partir de ces informations, affinées par l'administrateur en fonction du système surveillé, que l'IDS identifie d'éventuelles attaques ayant lieu dans le système informatique. Dans cette approche, l'IDS se focalise donc sur l'identification des utilisations abusives (misuse). Une autre mise en œuvre conforme à la terminologie mais originale dans la pratique de cette approche de détection par scénarios consiste à constituer une base de connaissance des comportements permis dans le système (et non des comportements abusifs) pour configurer les actions de détection (des utilisations normales en quelque sorte).
On peut ensuite comparer les systèmes de détection d'intrusion en fonction du mode de fonctionnement des mécanismes de détection qu'ils mettent en œuvre. De manière générale, un IDS peut tenter d'identifier des attaques en s'appuyant sur des informations relatives aux transitions ayant lieu dans le système (l'exécution de certains programmes, de certaines séquences d'instructions, l'arrivée de certains paquets réseau, etc.) ou bien en étudiant l'état de certaines parties du système (par exemple, l'intégrité des programmes stockés, les privilèges des utilisateurs, les transferts de droits, etc.).
Ensuite, les IDS s'appuient généralement sur des sources de données différentes. Certains IDS, dits « réseau » ou NIDS (pour Network IDS) examinent les paquets transportés par le réseau. D'autres IDS, dits « système » ou HIDS (pour Host IDS) s'appuient sur les traces d'exécution fournies en général par le système d'exploitation mais parfois aussi par les applications. (Bien que la distinction ne soit pas très marquée dans la pratique, il est utile de distinguer l'audit de bas niveau disponible au niveau des systèmes d'exploitation (qui peut aller jusqu'à des traces listant les appels systèmes exécutés) des informations d'audit de plus haut niveau, généralement plus riches de sens mais moins exhaustives, fournies par certaines applications.) D'autres IDS sont également en train d'apparaître appuyés sur des fonctions de corrélation et, dans ce cas, on peut considérer qu'ils sont eux-mêmes des systèmes utilisant les alertes d'autres senseurs comme source de données.
Lors de la détection d'une attaque, un système de détection d'intrusion peut adopter plusieurs comportements. En règle générale, une réponse passive est adoptée : l'IDS diffuse une alerte identifiant l'attaque détectée vers un système d'analyse ou de diffusion. Toutefois, on peut envisager des réponses plus actives, parmi lesquelles nous distinguons d'abord la mise en place (automatique) de contre-mesures destinées à limiter la portée d'une intrusion éventuelle. Par exemple, l'IDS peut réagir en reparamétrant un firewall pour mettre en place des règles de blocage temporaires de certains flux réseaux anormaux. Bien entendu, il importe de bien valider la fiabilité de la détection d'intrusion avant d'activer de telles contre-mesures automatiques. Dans la pratique, peu d'administrateurs sécurité envisagent concrètement de mettre en place ce type de réaction. Nous laissons au lecteur le soin de deviner la dénomination d'une réponse active après détection d'une attaque - duale d'une contre-mesure dans le vocabulaire « tactique ». Dans la pratique, nous espérons que peu d'administrateurs chargés de la sécurité envisagent cette dernière catégorie de comportement : compte tenu de la législation française, ce type de réaction ne nous semble pas permis dans le domaine civil.
Enfin, on peut également intégrer la fréquence d'utilisation de l'IDS dans les caractéristiques identifiables. Dans la perception courante d'un IDS, celui-ci est toujours utilisé de manière continue. Toutefois, dans certains cas, il peut également être important de bien identifier une détection effectuée en temps différé. (Par exemple du fait d'un HIDS analysant des fichiers traces transmis seulement toutes les heures.) On peut aussi envisager que certains outils dont l'utilité est avérée dans la pratique y compris pour révéler les traces d'une intrusion passée trouvent leur place dans cette classification au niveau d'une fréquence d'utilisation périodique, comme les outils de vérification d'intégrité (type Tripwire) ou les outils de recherche de vulnérabilité (type COPS, SATAN, ou Nessus).
Alertes et fausses alertes
[modifier | modifier le wikicode]Parmi les comportements possibles pour un IDS, on peut envisager les quatre possibilités recensées dans le tableau suivant qu'une intrusion est ou non en cours dans le système informatique et que le système de détection d'intrusion a émis ou non une alerte.
Pas d'alerte | Alerte | |
---|---|---|
Pas d'attaque | Vrai négatif | Faux positif |
Attaque en cours | Faux négatif | Vrai positif |
Parmi ces quatre comportements, les vrai négatif et vrai positif correspondent aux comportements souhaités. Toutefois un IDS est généralement imparfait et conduit à l'apparition des deux autres comportements non désirés. Parmi eux, un faux négatif correspond à une attaque non détectée, et un faux positif à l'émission d'une fausse alerte. Les différents IDS souffrent généralement d'imperfections donnant lieu à l'apparition de ces comportements non désirés, mais selon des axes différents suivant les méthodes de détection qu'ils utilisent.
Un reproche fréquemment fait en direction des IDS utilisant une méthode de détection comportementale est de contenir dans leur principe même de fonctionnement la possibilité de fausses alertes (un changement de comportement légitime détecté comme anormal) ou de faux négatifs (par exemple pour une attaque très lente) ; tandis que les approches par scénarios semblent théoriquement être plus exactes. Toutefois, la base de connaissance utilisée dans les IDS par scénarios exige une maintenance constante et, dans la pratique, souffre également nécessairement d'imperfections. Malgré tout, la réputation des IDS comportementaux semble avoir souffert durablement de leur imperfection de principe (à notre sens de manière assez injustifiée), notamment du fait de la possibilité de faux négatifs.
Bien que les faux négatifs soient effectivement le premier des comportements indésirables pour un IDS, les faux positifs sont importants aussi : ils peuvent conduire à une réelle perte de confiance dans les capacités de détection de l'IDS de la part des administrateurs qui peut finir par remettre en cause la finalité de l'IDS. C'est même une des voies d'attaque envisageables contre un système équipé d'un IDS : générer un nombre suffisamment important de fausses alertes pour réduire l'attention des administrateurs et dissimuler une attaque réelle. De plus, dans la pratique, les faux positifs dus à l'environnement de l'IDS ou à des signatures d'attaque un peu trop affirmatives sont souvent nombreux ; et ceci nécessite généralement un reparamétrage de l'IDS pour faciliter son exploitation, au prix de l'introduction de possibilités de faux négatifs. La gestion des faux positifs est le premier problème auxquels sont confrontés les administrateurs d'un IDS, et il est généralement de taille. À notre sens, les IDS basés sur une approche par scénarios, c'est à dire la plupart des IDS courants, souffrent sur ce point d'un réel problème qui demanderait certainement de développer à la fois les possibilités d'adaptation de l'IDS à son environnement (peut-être par des moyens de corrélation) et une meilleure validation des signatures d'attaque disponibles.
L'utilisation de techniques de corrélation d'alertes provenant de plusieurs IDS semble être une des voies envisageables pour traiter ces problèmes d'analyse des alertes et notamment des fausses alertes. Dans ce cadre, la diversification des méthodes de détection utilisées par les différents IDS, ainsi que de leurs sources de données est aussi à nouveau envisageable. (Dans un certain sens, il s'agit d'ailleurs de ré-inventer la roue une fois de plus puisque le précurseur des systèmes de détection d'intrusion, nommé IDES, combinait déjà l'utilisation d'une approche comportementale -statistique- et d'une approche à base de règles -système expert-, dans les années 1980 du côté de Stanford.)
Approches étudiées et tendances
[modifier | modifier le wikicode]Les différentes approches de la détection d'intrusion présentées dans la terminologie ont pour la plupart toutes été étudiées au niveau de système expérimentaux, notamment dans les laboratoires de recherche ou les universités.
Toutefois, à cette diversité des expérimentations s'oppose une focalisation quasi exclusive des solutions techniques disponibles dans le domaine industriel sur les systèmes de détection d'intrusion réseau utilisant une approche par scénarios, et plus précisément de signatures d'attaques. La quasi-totalité des IDS commerciaux utilisent cette approche, peut-être parce que c'était l'une de celles qui étaient les plus directes à mettre en œuvre et à déployer dans les systèmes informatiques courants. Des solutions existent également pour la détection d'intrusion à partir des traces systèmes, toujours en utilisant généralement une approche par scénario (recherche d'évènements dans les traces). Toutefois, la plupart de ces HIDS utilisent les traces standards des systèmes d'exploitation, généralement assez peu exhaustives (en tout cas en comparaison des fonctions d'audit système disponibles sur les systèmes C2 et supérieurs dans la classification du livre orange - ceci dit celles-ci absorbent une part significative des ressources d'une machine seulement dans l'objectif de surveiller l'autre part et sont rarement déployées).
Concrètement, ce sont donc les systèmes de détection d'intrusion réseau utilisant des bases de signatures qui dominent les mises en œuvre opérationnelles.
Schéma d'architecture IDWG
[modifier | modifier le wikicode]Plusieurs schémas ont été proposés pour décrire les composants d'un système de détection d'intrusion. Parmi eux, nous avons retenu celui issu des travaux de l' Intrusion Detection exchange format Working Group (IDWG) de l' Internet Engineering Task Force (IETF) comme base de départ, car il résulte d'un large consensus parmi les intervenants du domaine. L'objectif des travaux du groupe IDWG est la définition d'un standard de communication entre certains composants d'un système de détection d'intrusion. Ce standard de communication s'appuie sur le modèle d'architecture présenté dans la figure suivante.
L'architecture IDWG contient des capteurs qui envoient des évènements à un analyseur. Un ou des capteurs couplés avec un analyseur forment une sonde. Une sonde envoie des alertes vers un manager qui la notifie à un opérateur humain.
Exemple d'architecture
[modifier | modifier le wikicode]Dans la pratique, le modèle fonctionnel d'architecture présenté précédemment doit être adapté pour une mise en place concrète des différents éléments techniques du système de détection d'intrusion. Nous présentons dans la figure suivante un exemple de déploiement de système de détection d'intrusion qui nous semble un peu plus représentatif des contraintes réelles de mise en place.
Dans ce schéma, nous faisons apparaître trois sondes de détection d'intrusion : deux sondes réseau et une sonde système. On peut par exemple supposer que les deux sondes réseaux sont déployées à des endroits différents du système informatique l'une au niveau du réseau interne, l'autre par rapport à un point réseau intéressant (on peut aussi les envisager séparées sur des sites distants les uns des autres ou par des firewall). La sonde système peut par exemple être associée à un serveur de centralisation de traces mis en place sur le réseau local. Dans la mise en place présentée sur la figure, des collecteurs intermédiaires ont été ajoutés à proximité de deux groupes de sondes : la sonde réseau surveillant le brin réseau distant, et les deux sondes réseau et système s'intéressant au réseau interne. Ces deux collecteurs intermédiaires propagent ensuite les traces vers un collecteur central associé à un SGBD sur lequel les administrateurs de sécurité peuvent consulter et traiter les alertes.
Dans la pratique, ces collecteurs intermédiaires n'apparaissent généralement pas explicitement. Ils correspondent plus ou moins aux capacités de stockage temporaire et de transmission en différée des sondes vers leur manager. Le collecteur central correspond lui au manager des différentes sondes et offre à la fois des fonctions de gestion des sondes et de consultation des alertes. Toutefois, à notre sens il est intéressant de les faire apparaître explicitement pour mettre en évidence certaines des fonctions qui peuvent être utiles au niveau de la collecte et du transport des alertes. Les collecteurs intermédiaires peuvent gérer les flux réseaux et optimiser le transport des alertes en tenant compte, par exemple, des problèmes de disponibilités du collecteur central.
Si des fonctions de corrélation ou de groupement d'alertes sont ajoutées dans l'architecture de sécurité, celles-ci peuvent éventuellement être mises en œuvre de manière distribuée au niveau des collecteurs intermédiaires. Dans une architecture comme celle définie par l'IDWG (voir figure) ou dans la plupart des architectures disponibles à l'heure actuelle, l'ensemble des traitements de corrélation doivent être mis en œuvre au niveau du collecteur central (manager associé éventuellement à un SGBD). Ce point central peut alors devenir un point critique du point de vue des performances. Par ailleurs, certains des traitements de corrélation simples (comme le groupement d'alertes) peuvent avantageusement être réalisées au plus près des sondes, en tirant ainsi parti d'une distribution des calculs. L'alternative à l'introduction (au moins au niveau logique) des collecteurs intermédiaires est alors de modifier le fonctionnement des sondes, ce qui pose aussi des problèmes de performance.
Les collecteurs intermédiaires peuvent aussi être associés plus étroitement à la problématique de gestion opérationnelle des sondes (lesquelles peuvent provenir de constructeurs différents) voire à la mise en œuvre de la réaction.
D'un point de vue décisionnel, il nous semble que ces réflexions ne se limitent pas à l'aspect de la collecte des alertes (ou même de la corrélation), l'introduction de ce niveau intermédiaire entre les sondes d'analyse et le manager correspond en quelque sorte à l'introduction d'un niveau décisionnel tactique entre les agents opérationnels (en contact direct avec le terrain) et un niveau d'analyse stratégique auquel les décisions générales d'action peuvent être prises avec plus de recul.
Par contre, dans la pratique, les architectures mises en œuvre correspondent classiquement à la configuration présentée dans la figure suivante (très proche de celle identifiée par l'IDWG).
Solutions (réseau)
[modifier | modifier le wikicode]Comme nous l'avons déjà mentionné, la plupart des solutions existantes en matière de détection d'intrusion concernent la mise en place de NIDS (IDS réseau) complétés éventuellement par certains HIDS (IDS système) et du logiciel de gestion associé (manager). Dans cette section, nous étudierons certaines des solutions les plus populaires dans les domaines commerciaux et open-source, à savoir l'IDS RealSecure et le NIDS Snort. Nous nous intéresserons également à une solution open-source complète, qui capitalise d'ailleurs sur certains des succés de Snort, le système Prelude-IDS.
RealSecure
[modifier | modifier le wikicode]RealSecure est la solution IDS proposée par la société ISS (Internet Security Systems). Cette solution s'appuie assez naturellement sur une architecture du type de celle proposée par l'IDWG. Dans sa solution, ISS propose toutefois deux types de sondes : un NIDS RealSecure Network Sensor (le plus connu), et un HIDS RealSecure Server Sensor. Ces sondes sont complétées par une machine de management (qui peut être installée au côté d'une sonde dans une configuration mono-machine) et un logiciel d'administration graphique de bonne qualité. La console de RealSecure est divisée en 3 grandes parties : la partie inférieure indique l'état des différentes sondes installées dans le système (et notamment leur niveau de mise à jour), la partie gauche rassemble les différentes alertes remontées par les sondes en temps réel classées selon le type de l'attaque détectée, la partie droite présente la même information mais classée en fonction de trois niveaux de gravité pré-établis pour les alertes.
Le NIDS utilise une base de signatures de reconnaissance élaborée par le centre de veille d'ISS, nommé la X-Force. ISS a développé un mécanisme spécifique de diffusion des mises à jour de cette base de signatures, communes à un certain nombre de ses produits, sous le nom d'eXpress Update (ou XPU). Ceci permet un déploiement rapide des mises à jour, auquel il faut pourtant ajouter une phase d'administration (pour l'instant indispensable) pour l'activation ou non des nouvelles signatures dans la configuration (ou « politique ») de sécurité des produits.
RealSecure propose également des moyens de réaction permettant d'envisager la mise en place automatique de contre-mesures en cas de détection d'une attaque, en reparamétrant certains modèles de firewall (CheckPoint notamment) pour bloquer les adresses IP à l'origine des attaques identifiées. L'outil permet d'effectuer un certain nombre de recherches dans la base des alertes collectées, ainsi que la production de rapports de synthèse concernant l'activité générale du système de détection d'intrusion.
Dans l'ensemble, la technologie fournie par RealSecure est assez complète, ce qui permet à ISS de proposer des déploiements de grande envergure, du type de ceux présentés dans ses brochures commerciales. Toutefois dans la pratique, RealSecure présente comme beaucoup d'IDS le problème de la gestion des nombreuses fausses alarmes générées par les sondes (et notamment les sondes réseau). Dans le cas de ce produit, c'est parfois assez frappant, au point de remettre en cause certaines signatures, ou en tout cas en obligeant à une désactivation quasi-systématique. De la même manière, les fonctions d'analyse disponibles sont essentiellement tournées vers une finalité de production de rapports (comptage, regroupement par types pré-définis, par source ou par destination, etc.) et permettent assez difficilement d'appliquer une méthode même manuelle de corrélation entre les alertes pour aboutir à un diagnostic plus élaboré. Cette tâche est encore compliquée par le bruit de fond existant sur le réseau (il y a toujours, quelque part, un équipement ou un logiciel qui pollue la ligne avec un trafic certes suspect, mais généralement sans danger), révélé par les sondes de détection d'intrusion, mais auxquels, parfois, il n'est pas possible d'appliquer facilement une correction technique et dont on souhaiterait pouvoir automatiser le traitement des alertes associées. À l'usage, le système reste donc assez imparfait à moins de disposer de moyens importants permettant d'agir à la fois sur les sondes et sur les systèmes observés, ou de disposer d'un outil tiers d'analyse et de corrélation. ISS propose à présent dans sa gamme un produit nommé Site Protector, visant à répondre à ces problématiques d'analyse ; mais les fonctions de corrélation attendues semblent pour l'instant relativement limitées.
Snort
[modifier | modifier le wikicode]Face aux systèmes de détection d'intrusion complets proposés dans les offres commerciales intégrant sondes, signatures, moyens de distribution, interface graphique, etc. ; les solutions open-source ont progressivement trouvé leur place en tirant parti des avantages d'un développement dans le cadre du logiciel libre. Ainsi, l'IDS le plus répandu à l'heure actuelle est probablement le logiciel open-source Snort qui est une sonde de détection d'intrusion réseau (NIDS). Le modèle open-source appliqué à Snort a notamment permis un développement plutôt rapide d'une large base de signatures (presque 3000 à ce jour) appuyée essentiellement sur le volontariat et un langage de définition totalement public. Cette base est désormais mise à jour très rapidement et diffusée par Internet (sur le Web par exemple). Par ailleurs, la limitation du projet à la réalisation d'une sonde de détection d'intrusion réseau a permis des améliorations successives très importantes en termes de performance et de capacités d'analyse et a également débouché sur la mise à disposition ultérieure d'extensions orientées vers la diffusion des alertes, le stockage dans les bases de données, etc.
Les signatures Snort font désormais partie du bagage que les administrateurs de sécurité doivent pouvoir utiliser pour envisager la détection d'intrusion et la réaction rapide à de nouvelles attaques (ne serait-ce que pour disposer des détails précis de caractérisation d'un flux d'attaque). À titre d'exemple, nous présentons dans les figures suivantes deux signatures d'attaque (et leurs commentaires) utilisables par Snort respectivement pour détecter une tentative d'exploitation d'une faille grave du service RPC de plusieurs versions de Microsoft Windows et pour repérer le flux généré par un vers baptisé « Klez ».
On voit que ces signatures correspondent à la recherche de séquences particulières dans un flux réseau TCP (sur des ports ou pour des services particuliers). La sonde Snort se charge d'effectuer le ré-assemblage de la séquence TCP parmi tous les paquets IP se présentant devant son interface de capture malgré toutes les techniques de dissimulation éventuellement utilisées (fragmentation, déséquencement, etc.) et de réaliser la recherche des différentes signatures efficacement.
La qualité des signatures disponibles autour de Snort (que ce soit dans la distribution principale du logiciel, ou sur le site Web associé: http://www.snort.org/dl/rules/ et http://www.snort.org/snort-db/) semble globalement assez bonne ; même si elles sont fournies sur la base du volontariat (ce qui ne veut pas dire qu'elles ne génèrent pas quand même un nombre important de fausses alarmes dans un réseau actif...).
Prelude-IDS
[modifier | modifier le wikicode]Contrairement au projet Snort, focalisé sur la réalisation d'une sonde spécifique, le projet Prelude-IDS propose un système plus complet comprenant :
- une infrastructure logicielle (librairie, format de communication) permettant de développer différentes sondes intégrées dans l'infrastructure Prelude ;
- un manager capable de collecter les alertes issues de ces différentes sondes et de les stocker dans une base de données (MySQL en général) ;
- un certain nombre de sondes, avec notamment :
- un NIDS capable de ré-utiliser les signatures de Snort, et d'effectuer d'autres analyses réseau - celui-ci a désormais été déclaré obsolète en faveur de l'utilisation directe de Snort ;
- un HIDS permettant d'analyser différents types de traces (en général au format syslog) ;
- un certain nombre de patch permettant d'adapter d'autres logiciels de sécurité pour qu'ils émettent des alertes en direction de Prelude, comptant notamment : Snort lui-même nativement, pflog (traces du firewall pf d'OpenBSD), systrace (contrôle des appels système), honeyd (pot de miel) et Nessus (outil de recherche de vulnérabilités) ;
- une interface de visualisation des différentes alertes générées nommée Piwi (en Perl), interface qui est en train d'être remplacée par une autre, nommée Prewikka, en cours de développement pour permettre un contrôle plus complet des autres composants.
D'après notre expérience, l'ensemble logiciel Prelude-IDS (v.0.8 et v.0.9, c'est à dire les deux dernières versions stables) est parfaitement capable de gérer correctement un système de détection d'intrusion composé de 2 ou 3 sondes déployés sur un système informatique réel de bonne taille en production depuis prés d'un an. Les mécanismes de collecte d'alertes et de communication nous semblent donc tout à fait stables, tout comme le stockage des alertes dans une base de données externe.
Pour l'instant, les possibilités de contrôle du système de manière centralisée depuis l'un des managers sont limitées, ces aspects doivent être pris en compte par des moyens d'administration conventionnels, mais comme les différents composants (notamment les sondes) gèrent correctement les arrêt/relance du point de vue de la communication avec le manager ceci n'est pas bloquant (avec un nombre limité de sondes). Ce point devrait faire l'objet de certaines des nouvelles fonctionnalités dans la prochaine version du système de manière à permettre un contrôle centralisé des sondes (et notamment de leur configuration de détection).
L'interface d'accès aux alertes de Prelude est encore assez limitée. La version précédente, Piwi, est limitée à des possibilités de visualisation simples via un navigateur Web et un serveur HTTP (via des cgi Perl). La figure suivante présente un exemple de cette interface. Piwi permet aussi de réaliser un certain nombre de tris et de filtrages sur les requêtes d'interrogation SQL sous-jacentes, mais tout travail d'analyse plus poussé demande d'interroger directement la base de données. Il n'est pour l'instant pas possible d'agir sur le contenu de la base de données (ce qui serait, à notre sens, le premier pas vers des fonctions de corrélation et d'agrégation d'alertes). À nouveau, une autre version de l'interface est en cours de développement, sur des bases totalement différentes.
Globalement, Prelude-IDS est un logiciel qui nous semble particulièrement prometteur, du fait qu'il jette les bases d'un système de détection d'intrusion complet, déjà capable de remplir les fonctions d'une sonde réseau ou système efficace, mais également susceptible de rassembler des informations provenant de plusieurs sondes de différents types dans un même entrepôt de données. Sur cette base, l'intégration de fonctions de groupement et de corrélation avancées nous semble même alors possible.
Traitement des alertes
[modifier | modifier le wikicode]Limites
[modifier | modifier le wikicode]Notamment dans le domaine des sondes de détection d'intrusion réseau, les techniques de détection utilisant une application de signatures sur les évènements observés vont avoir pour effet de sélectionner certains des évènements, contenant un marqueur spécifique à l'origine de l'activation d'une signature. La plupart du temps, chacun des évènements contenant ces marqueurs va être à l'origine de la génération d'une alerte. Pourtant, en général, il serait souhaitable que les alertes soient d'un niveau d'abstraction plus élevé, et qu'elles rassemblent différents marqueurs correspondant à des évènements différents mais associés à une même action.
Dans cette vision, il ne s'agirait pas véritablement de demander à l'IDS d'établir des liaisons de corrélations (cause à effet, topologie, etc.) mais plutôt d'agréger correctement les alertes générées de manière à garantir la correspondance entre chaque alerte et au plus une action. Toutefois, ce besoin correspond à la mise en œuvre d'une analyse multi-évènements : une même action pouvant être à l'origine de plusieurs évènements (par exemple, le déclenchement d'une attaque réseau peut conduire à la génération de plusieurs paquets IP), la sonde devrait être capable de rechercher des similarités entre marqueurs appartenant à plusieurs d'entre eux. Elle devrait donc pouvoir réaliser une analyse multi-évènements.
Dans la représentation de ce problème que nous donnons dans la figure suivante, la forme des marqueurs est ce qui permet à la sonde de les repérer mais, suivant que la couleur des évènements auxquels ils appartiennent est prise également en compte ou non, le nombre d'alertes générées est différent. Ainsi, la génération de l'alerte A4 pourrait être évitée.
Toutefois, on voit bien sur cette illustration que l'analyse multi-évènements exige de prendre en compte les relations existant entre deux évènements successifs, parfois séparés dans le temps par un grand nombre d'autres évènements, et même d'autres alertes. Le travail d'analyse de la sonde est donc largement plus difficile. Par ailleurs, l'alerte A3 dans le cas multi-évènements est générée tardivement par rapport à l'alerte A1 dans le cas mono-évènement. Si l'agrégation de plusieurs marqueurs facilite le diagnostic sécurité, d'un autre côté, ce retard peut aussi être préjudiciable à la sécurité. Ce compromis de mise en œuvre complique également la conception de la sonde.
Pour aborder ce type de traitement, que ce soit au niveau des sondes elles-mêmes ou au niveau des systèmes de collecte des alertes, il nous semble que les IDS actuels devraient intégrer des fonctions nouvelles, généralement regroupées sous la désignation de corrélation d'alertes.
Architecture de corrélation d'alertes
[modifier | modifier le wikicode]L'architecture IDWG n'est pas totalement adaptée pour couvrir complètement les besoins de la corrélation d'alertes. Une architecture mieux adaptée est présentée dans la figure suivante, qui dissocie les consoles de gestion des différentes sondes et la console des alertes qui peut bénéficier des traitements d'autres outils de concentration d'alertes.
Dans cette architecture, les concentrateurs d'alertes peuvent jouer un rôle vis à vis de la collecte et du transport, mais ils peuvent également traiter les alertes pour réaliser des groupements ou certaines corrélations et fournir au niveau de la console des alertes une information agrégée (à la place ou en complément des alertes originelles). Les fonctions de corrélation les plus avancées ou nécessitant la connaissance de l'ensemble des alertes générées dans le système, doivent elles être réalisées au niveau de cette console. (La console n'est pas nécessairement associée directement à l'interface homme-machine de l'IDS.) Les associations entre les différentes sondes et les concentrateurs d'alertes sont établies en fonction de ces possibilités de corrélation, et elles peuvent être différentes des associations nécessaires pour la gestion technique des sondes réalisée par les consoles de gestion. Les secondes peuvent être imposées par les constructeurs par exemple, tandis que les premières peuvent s'appuyer sur la nature des sondes (par exemple, NIDS d'une part, HIDS d'autre part).
Groupement
[modifier | modifier le wikicode]Parmi les fonctions de corrélation envisageables, la première que nous appellerons plutôt une fonction de groupement consiste à rassembler dans une même alerte (virtuelle) des alertes similaires provenant d'un même événement.
Ces groupements peuvent permettre, par exemple, de regrouper des alertes émises par des sondes différentes observant plusieurs fois le même événement (par exemple le long de son trajet pour des sondes réseau). Ce type de regroupement n'est pas si facile à réaliser : dans le cas de sondes utilisant des bases de connaissance différentes, les nomenclatures des attaques peuvent être très différentes et nécessiter la mise au point de tables de correspondance importantes. De tels regroupements sont également plus intéressants qu'il n'y paraît : outre qu'ils diminuent le nombre d'alertes à traiter pour l'opérateur, ils peuvent permettre d'enrichir la description de l'alerte virtuelle globale. En effet, des sondes différentes ont pu renseigner des informations différentes dans les indications de leurs alertes (adresse IP pour l'une, nom de compte pour l'autre par exemple).
Les autres types de regroupement les plus immédiats consistent à rassembler certaines attaques concernant une même source ou une même destination. Ainsi, un scan (une recherche active de vulnérabilités) réalisé par un outil donné (ou certains virus) donnera probablement lieu à de nombreuses alertes qui peuvent être regroupées avec une bonne fiabilité si elles suivent une séquence spécifique et ciblent la même destination. C'est également le cas si des alertes similaires provenant de la même source visent des destinations successives. Dans un cas comme dans l'autre, le regroupement est certainement à faire avec une certaine prudence, mais le gain en termes de lisibilité pour l'alerte virtuelle globale par rapport à l'ensemble des alertes élémentaires est très important, tout comme le gain de temps pour les opérateurs.
Enfin, une autre catégorie de regroupement qui semble souhaitable, et qui est liée à la précédente, c'est bien entendu le regroupement temporel. Des alertes périodiques, ou des alertes ayant lieu dans un intervalle de temps réduit peuvent donner lieu à un premier regroupement, ce qui est d'autant plus intéressant si elles présentent des similarités du type évoqué précédemment. Toutefois, les intervalles de temps à utiliser sont difficiles à évaluer ; surtout si on prend en compte le fait qu'un attaquant intelligent puisse prévoir ce type de regroupement et tenter de l'éviter ou de le détourner. La notion de proximité temporelle, pour des alertes de sécurité, reste à manier avec précaution. Mais c'est une information très importante qu'il est impossible d'ignorer quand on réalise un traitement des alertes générées par les IDS. Un effort d'automatisation sur ce point nous semble vraiment souhaitable.
Corrélation
[modifier | modifier le wikicode]Outre le regroupement des alertes en alertes virtuelles plus faciles à gérer pour les administrateurs, on pourrait également attendre d'un IDS qu'il soit en mesure de réaliser un suivi de séquences d'alertes afin d'essayer de fournir un diagnostic plus complet d'une intrusion éventuelle ou d'éliminer des fausses alarmes.
Ce raisonnement part de l'hypothèse qu'en cas d'intrusion, les actions d'attaque effectuées par un intrus suivront une certaine logique d'enchaînement et que des attaques successives (et donc des alertes successives) présenteront des liens entre elles permettant à la fois de confirmer l'alarme suggérée par chaque alerte prise isolément, mais également d'établir un diagnostic plus complet de l'intrusion, de ses objectifs, de son niveau d'avancement, etc. ; et donc du danger associé.
Pour réaliser de telles corrélations, un IDS devrait disposer d'une base de connaissance décrivant non seulement les attaques élémentaires, mais également les enchaînements possibles entre différentes attaques élémentaires pouvant constituer un scénario d'intrusion plus élaboré. Il s'agit schématiquement de décrire les liens de cause à effet entre attaques afin de permettre à l'IDS de raisonner sur les liens existant entre les alertes qu'il connaît (ou plus précisément les attaques auxquelles elles correspondent). Dans certains cas, on peut même envisager que l'IDS soit en mesure d'effectuer des hypothèses sur l'existence de certaines actions non-observées (ou inobservables) afin de compléter des scénarios d'intrusion. Enfin, en établissant le lien entre les préconditions des attaques et les vulnérabilités connues recensées dans le système, ou entre les effets de ces attaques et les objectifs de sécurité du système, l'identification des possibilités de succès de l'intrusion et de son niveau de danger dans le système visé pourrait également être envisagée. De telles fonctions permettraient bien évidemment de faciliter énormément le travail de l'administrateur de sécurité chargé de superviser l'IDS auquel serait fourni une proposition de diagnostic et un niveau de risque plus réfléchis, basés sur les évènements observés par les différentes sondes du système.
L'approche de la corrélation que nous présentons ici est avant tout basée sur une vision logique. Le fonctionnement du moteur de corrélation et la structure du diagnostic sont basés sur des raisonnements logiques concernant les attaques, leur faisabilité, les possibilités d'enchaînement, etc. D'autres approches ont été proposées, appuyées sur des techniques statistiques de caractérisation ou de classification des alertes. Dans tous les cas, ces travaux n'ont pour l'instant pas réellement vus de mise en œuvre effective dans des implémentations opérationnelles de système de détection d'intrusion. Par contre, un certain nombre d'efforts ont déjà était faits dans certaines implémentations pour faciliter le rapprochement entre diverses sources d'information, notamment en vue de limiter le nombre de fausses alertes.