Physique atomique/Quantité de mouvement du rayonnement
Physique atomique |
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Dans ce qui précède, on s’est intéressé aux échanges du rayonnement avec la matière. Ici on va voir une propriété du rayonnement. Le rayonnement possède une quantité de mouvement. On va fonder cette notion de quantité de mouvement du rayonnement sur la force exercée par un faisceau de lumière sur un écran que l’on appelle pression de la radiation.
La pression de radiation
[modifier | modifier le wikicode]On montre (voir Cagnac tome1 pages :38-42) que la composante normale de la pression de radiation en fonction de la densité volumique d’énergie u pour une radiation avec i comme angle d’incidence est donnée par :
- cas d’une onde normale (i=0): la pression de radiation est égale à la densité d’énergie u : .
- cas d’un rayonnement isotrope:
c'est-à-dire que la radiation est une superposition d’ondes dirigés dans toutes les directions avec une énergie répartie proportionnellement à l’angle solide : il faut faire la moyenne de cos2i sur l’angle solide 2 correspondant au demi espace :
C’est cette relation qui est utilisée dans la théorie du rayonnement thermique en équilibre dans une enceinte fermée.
Interprétation en terme de quantité de mouvement
[modifier | modifier le wikicode]L’onde électromagnétique qui frappe une paroi de surface S exerce une force de pression qui tend à la mettre en mouvement c’est-à-dire lui communiquer de la quantité de mouvement.
La loi fondamentale de la dynamique exprime une relation entre la force appliquée à la paroi et la variation du vecteur quantité de mouvement
L’onde + paroi forme un système isolé, la règle de conservation de la quantité de mouvement donne :
Pendant une expérience de courte durée t, la variation de la quantité de mouvement de la paroi selon oz est :
- Cas d’une paroi absorbante :
La paroi ayant absorbé le train d’onde incident a pris en même temps sa quantité de mouvement,
.
Le faisceau lumineux incliné à l’incidence i , et qui frappe la surface S de la paroi de section droite Scos(i) ; il transporte pendant t l’énergie : W = S cos(i) uct
On déduit :
- Cas d’une paroi réfléchissante :
Le train d’onde possède initialement la quantité de mouvement repart de la paroi en emportant une quantité de mouvement .
La densité d’énergie qui règne au voisinage de la paroi est la somme des deux contributions de l’onde incidente et l’onde réfléchie. Ces deux contributions sont égales et chacune vaut la moitié du total c-à-d u/2. L’énergie apporté par le train d’onde incident pendant la durée t est donc:
Nous déduisons que :
Les deux cas 1. et 2. et pour un angle d’incidence i quelconque, s’interprètent totalement si l’on admet que le train d’onde transportant l’énergie W possède un vecteur quantité de mouvement : de direction parallèle à la direction de propagation et de même sens et de module .
En effet :
Dans le cas d’une paroi réfléchissante :
Quantité de mouvement du photon
[modifier | modifier le wikicode]- À partir de la pression de radiation :
Nous avons attribué un vecteur quantité de mouvement de module W/c au train d’onde qui transporte l’énergie W. De même un photon d’énergie doit posséder aussi un vecteur quantité de mouvement de module et de direction parallèle à la direction de propagation et de même sens.
- À partir de la relativité :
On rappelle qu’une particule relativiste a une énergie et une quantité de mouvement , avec m la masse relativiste donnée par :
- La quantité de mouvement peut s’écrire aussi :
- La quantité de mouvement et l’énergie W=mc2 forme le quadrivecteur impulsion énergie. L’invariance du module de ce quadrivecteur par changement de référentiel galiléen conduit à la relation connue :
Le photon considéré uniquement comme une quantité d’énergie doit posséder une quantité de mouvement comme n’importe quelle particule.
Le photon se propage avec la vitesse de l’onde, c-à-d la vitesse c de la lumière. Cette valeur de la vitesse conduit à une masse infinie et donc à une énergie aussi infinie. La seule façon de concilier la vitesse c avec une énergie finie est de supposer une masse au repos m0 nulle. On obtient donc d’après les formules précédentes que le photon doit avoir une impulsion en accord avec le calcul donné par la pression de la radiation.
Expérience de Compton sur la diffusion des rayons X
[modifier | modifier le wikicode]En 1923 Compton a repris les expériences de diffusion de Barkla en analysant avec un spectromètre à cristal la longueur d’onde du rayonnement diffusé.
Compton envoie sur un bloc de graphite un pinceau de rayons X donné par un tube de Rœntgen à cathode de molybdène à peu près monochromatique de longueur d’onde Ǻ et de direction bien définie oz (voir figure).
La figure montre l’allure des spectres obtenus pour différentes valeurs de l’angle de diffusion . Chaque courbe représente la variation de l’intensité en fonction de la longueur d’onde . Le spectre du rayonnement diffusé se compose de deux raies :
- une composante à la longueur d’onde qu’on appelle composante Thomson car d’après la théorie classique de Thomson le rayonnement diffusé a la même fréquence que le rayonnement incident.
- une composante de longueur d’onde inexplicable par la théorie classique et que l’on appelle composante compton.
Les mesures effectuées par Compton montrent en plus que :
a- L’écart est positif : la composante Compton a toujours une longueur d’onde plus grande que la composante Thomson.
b- L’écart ne dépend que de l’angle de diffusion . Il est indépendant de la longueur d’onde et de la nature du bloc diffuseur.
La composante diffusée avec changement de longueur d’onde a été expliquée par Compton en considérant le photon comme une particule et en traitant le problème de collision entre cette particule et un électron.
Calcul de la collision élastique photon-électron libre
[modifier | modifier le wikicode]On considère comme électron libre tout électron dont l’énergie de liaison est négligeable devant l’énergie des photons incidents. On va appliquer les lois de conservation de l’énergie et de la quantité de mouvement à l’interaction entre le photon et l’électron qui forment un système isolé pendant le très court instant de la collision. La collision se fait selon le schéma ci-contre :
particule | grandeur | avant collision | aprés collision |
---|---|---|---|
Photon |
Energie Quantité de mouvement |
module: |
|
Electron |
Energie Quantité de mouvement |
nulle |
module:p direction: fait l'angle avec oz |
Les règles de la conservation d’énergie et d’impulsion donnent :
- Énergie :
- Impulsion:
- projection sur Ox :
- projection sur Oy :
- projection sur Ox :
On signale que la relation vectorielle de la conservation de l’impulsion montre que le mouvement se fait dans un plan, soit Oxz ce plan (plan de la figure).
On obtient donc 3 équations reliant la fréquence et les 4 inconnus \nu,, p et . On va donc choisir comme paramètre car quand on effectue une mesure expérimentale on impose à une valeur particulière.
On va déterminer la fréquence du photon diffusé :
Pour cela éliminons :
Élevons au carré chacune de ces égalités et les additionnons membre à membre
Nous pouvons également calculer à partir de la première équation :
de ces deux dernières relations on tire :
En divisant par on obtient :
Ce qui donne
Voyons si l’écart vérifie les propriétés observées expérimentalement :
- est positif.
- est fonction croissante de l’angle de diffusion du photon , puisque celui-ci ne varie que dans l’intervalle de 0 à où la fonction cosinus est monotone. On peut aussi écrire : .
- est entièrement déterminé par la connaissance de l’angle . Il est totalement indépendant de la nature du diffuseur, et aussi de la longueur d’onde . Le calcul de cet écart se ramène à celui de la constante figurant devant le facteur (1-\cos ), ayant les dimensions d’une longueur et qu’on appelle :
longueur d'onde compton  .
C’est la longueur d’onde pour laquelle l’énergie des photons est égale à l’énergie au repos de l’électron: . L’accord numérique entre les valeurs théoriques et expérimentales de la longueur d’onde Compton confirme l’interprétation du phénomène.
L’écart est de l’ordre de . L’importance relative des échanges d’énergie entre le photon et l’électron est déduite selon le cas :
- ou ce qui implique le photon cède très peu d’énergie.
- ou ce qui implique le photon cède la majeure partie de son énergie.
Électron Compton
[modifier | modifier le wikicode]Maintenant on va déterminer les caractéristiques de l’électron mis en mouvement par la collision, en fonction de .
Or on a vu que :
ce qui donne :
On déduit l’énergie cinétique de l’électron :
Nous retrouvons que l’électron ne prend qu’une part très faible de l’énergie du photon incident tant que , alors que dans le cas , l’électron prend la majeure partie de l’énergie du photon.
D’autre part d’après les deux projections de la relation de conservation de l’impulsion on déduit :
On obtient finalement :
Le signe moins dans l’expression de signifie simplement que le photon et l’électron partent de chaque côté de l’axe Oz. Lorsque croit de 0 à (c-à-d croit de 0 à /2), varie de - /2 à 0. n’est jamais supérieur à . L’électron est toujours envoyé vers l’avant.
Collision élastique photon-électron lié. Diffusion Thomson
[modifier | modifier le wikicode]Dans le paragraphe précèdent on a supposé que l’électron est libre et immobile. Mais ces calculs restent valables lorsque l’électron est faiblement lié à l’atome. C’est à dire des électrons ayant une énergie de liaison de l’ordre de quelques électrons-volts. Cette énergie dont on n’a pas tenu compte est en effet négligeable devant l’énergie des photons X qui varie entre 10keV et 1 MeV (c-à-d entre ~1Ǻ et ~1/100 Ǻ).
Mais l’atome contient aussi d’autres électrons qui sont fortement liés et dont l’énergie de liaison ne peut pas être négligée. Dans un choc élastique, l’énergie de liaison de ces électrons reste inchangée, c-à-d que l’électron reste lié. C’est donc l’atome entier qui encaisse le choc du photon et joue le rôle de cible.
Les équations de conservation restent valables à condition de changer seulement la signification des grandeurs W, p et qui doivent être rapportés à l’atome entier.
Tous les résultats trouvés précédemment restent valables, si on change seulement la valeur numérique de la masse au repos de l’électron par la masse de l’atome entier, elle est de 104 à 105 fois plus élevé que la masse de l’électron. L’écart de longueur d’onde est donc divisé par le même rapport. On obtient 10-6 Ǻ, valeur qui reste pratiquement négligeable devant la longueur d’onde du photon X (qu’il soit mou ou dur).